Face aux risques

Le cycle des PFAS

Les composés per et polyfluorés constituent une grande famille formée de produits chimiques fluorés de plusieurs milliers de composés. L’OECD a dénombré 4 730 composés en 2018 (OECD, 2018), mais ce nombre a rapidement augmenté avec l’évolution de la nomenclature et l’intérêt croissant porté à ces composés. Le CDC (Centers for Disease Control and Prevention) recense à ce jour plus de 8 000 PFAS, et l’ECHA (Agence Européenne des produits chimiques) plus de 10 000.

75 % de l’exposition humaine est liée à la consommation d’eau contaminée

Sources PFAS

Les effets toxiques sur la santé

Ces composés développés dans les années 30 ont été massivement utilisés dans les années 40 pour leur résistance à l’eau, à l’huile, mais aussi pour leur forte résistance à la température. Ils sont présents notamment dans les revêtements anti adhésifs, les emballages alimentaires…, et depuis les années 60 dans les mousses anti-incendie.

A partir de cette époque de nombreux PFAS ont été développés pour répondre à divers usages mais également aux évolutions de la réglementation. Ainsi les composés perfluorés à chaîne longue ont laissé place à des composés à chaîne courte (PFBA, PFBS, PFHxA, PFHxS…) puis à des précurseurs (6:2 FTAB, 6:2 FTOH…).

Ce n’est que depuis les années 1990 que des préoccupations ont commencé à émerger concernant les effets des PFAS sur la santé humaine et l’environnement : des études ont révélé que les PFAS sont des produits chimiques persistants, bioaccumulables, et que certains PFAS favorisaient des effets délétères toxiques pour la santé humaine (Hépatoxicité, immunotoxicité, suspicion d’effet perturbateur endocrinien, suspicion d’effet cancérogène).

En 2000, un grand fabricant de produits chimiques a volontairement cessé de produire deux des PFAS les plus courants, le PFOS et le PFOA, en raison de préoccupations environnementales et de santé, et à la suite du scandale dit des Dark Waters.

En 2006, l’Agence américaine de protection de l’environnement (EPA) a publié un rapport qui a classé le PFOA comme un « cancérogène probable ». Dès lors une réglementation a été mise en place en Europe et à l’étranger afin de restreindre l’utilisation de ces composés mais également d’encadrer la contamination des sols et des eaux. Enfin, il convient de soulever l’annonce de l’ECHA du 7 février 2023 qui propose de mettre en œuvre des restrictions d’utilisation sur plus de 10 000 PFAS.

La contamination aujourd'hui

A ce jour, la contamination des eaux par les PFAS est omniprésente. Ces composés sont détectés dans les eaux de surface, souterraines urbaines ou rurales, jusque dans les eaux potables. On observe en effet une concentration totale en PFAS de 3,22 ng.L-1 dans les précipitations françaises alors que ces chiffres peuvent atteindre 18ng.L-1 à proximité de certains sites industriels (Kwok et al., 2010; Scott, Spencer, et al., 2006). Cette contamination globale des eaux est reliée aux rejets industriels et à l’activité humaine. Ces émissions contaminent les eaux de surface à des concentrations oscillant entre 0 et 725 ng/L selon le site (Munoz et al., 2015a).

Fonctionnement des mousses AFF

La contamination des eaux de distribution est corrélée à la contamination des aquifères, ainsi qu’à l’absence ou à l’inefficacité des stations de traitement des eaux potables pour les PFAS.

Le rapport au parlement de février 2023 (Ministère de l’Ecologie, 2023) présente les dernières données de surveillance disponibles en France. Ce rapport renseigne tant sur les eaux souterraines que sur les eaux de surface. 20 000 analyses d’eaux souterraines ont été effectuées mettant en évidence la présence de 6 PFAS dans plus de 50% des échantillons à savoir le PFOS, PFHxA, PFOA, PFHxS, PFBSet le PFHpA. Ces composés sont présents à des concentrations pouvant dépasser localement le µg/L pour le PFOS et les 10 µg/L pour le PFOA.

Malgré tout, les concentrations en PFAS restent généralement modérées dans les eaux souterraines françaises. De plus cette contamination semble ponctuelle, concentrée dans les nappes de la Limagne d’Alsace, et de manière moins importante en région rhodanienne, dans le Nord, dans la vallée de la Seine, de la Meuse, et de la Moselle, en région Bretonne et sur le pourtour méditerranéen. Les eaux du bassin versant « Rhône Méditerranée, Corse » apparaissent comme les plus contaminées. On constate que lorsque les PFAS sont quantifiés (37% des aquifères, 42% en Auvergne Rhône Alpes), ces composés sont présents à des concentrations supérieures aux limites de la DCE. De plus, cette contamination semble toucher majoritairement les nappes alluviales (66%), alors que seulement 17% des aquifères karstiques sont concernés.

Les eaux de surface ont quant à elles été étudiées de manière moins exhaustive avec seulement 133 points de prélèvements. On constate cependant une fréquence importante de détection pour le PFOA (84%), le PFOS (85%) , le PFHxS (81%), le PFHxA (72%) et le 6:2 FTSA (52%), liés aux rejets d’effluents contaminés dans les eaux, notamment par les stations d’épuration. On observe des PFAS dans 22% des eaux en sortie de STEU.

La cartographie de contamination en Europe

La « carte de la pollution éternelle » a été construite en février 2023 par le journal Le Monde et ses dix-sept partenaires de l’enquête collaborative internationale « Forever Pollution Project ». Cette carte montre pour la première fois l’étendue de la contamination de l’Europe par les substances per- et polyfluoroalkylées (PFAS) persistants dans l’environnement.

Cette carte regroupe les données sur les contaminations détectées (réelles) en Rouge, les utilisateurs, les producteurs, et la contamination présumée.

En dehors de l’Europe :

  • Plus de 57 000 sites contaminés aux États-Unis dont plus de 710 installations militaires dans le pays et à l’étranger
  • Plus de 600 000 soldats américains ont été exposés à ces substances.
  • Au moins 60 sites suspects au Canada
  • Plus de 100 000 sites contaminés en Europe
  • La contamination par les PFAS aux États-Unis (28 novembre 2023)
Réglementations adoptées

La réglementation par zone

Du fait de l’omniprésence des PFAS dans l’environnement, de l’inquiétude croissante face aux effets et à l’exposition de ces composés, une réglementation s’est mise en place en Europe, ainsi qu’à l’international. Le cadre réglementaire s’est tout d’abord concentré sur le PFOS et le PFOA, puis s’est étendu à d’autre PFAS. On retrouve généralement deux types de réglementations :

  • Les restrictions de production, d’importation, et/ou d’utilisation (par exemple la réglementation REACh)
  • Les critères de qualité fixant des limites (conseillées par les valeurs guides ou imposées par les valeurs réglementaires) pour différentes matrices

En France, des arrêtés ministériels vont imposer la surveillance des PFAS, mais c’est le droit européen qui s’applique comme :

Le règlement Reach

Le règlement REACh est un cadre réglementaire qui enregistre, évalue et encadre les produits chimiques dans l’objectif de protéger la santé humaine tout en favorisant la compétitivité de l’industrie chimique. Il promeut également des méthodes alternatives pour l’évaluation des dangers des substances afin de réduire le nombre d’essais sur les animaux. Certains PFAS sont listés dans l’annexe XVII du règlement REACh, cette annexe identifie les substances soumises à des procédures destinées à limiter leur fabrication, leur utilisation ou leur mise sur le marché. Les composés présents dans cette liste sont donc interdits sauf autorisation spécifique.

Si le PFOS et le PFOA ne sont aujourd’hui plus encadrés par le règlement REACH mais par le règlement POP et la convention de Stockholm, REACh prévoit la restriction d’utilisation de 10 000 PFAS.  Des pays de l’Union européenne ont également proposé la restriction d’autres composés comme le PFHxS et le PFHxA, proposition soutenue par l’ECHA, ce qui devrait conduire en toute logique à l’ajout de ces composés à l’annexe 17 de REACH. Enfin, les Pays Bas, l’Allemagne, la Norvège, le Danemark et la Suède ont déposé en janvier 2023 une proposition pour interdire plus de 10 000 PFAS. A la rédaction de ce rapport, l’ECHA ouvrait une consultation de 6 mois pour échanger avec les principales parties prenantes.

La directive cadre sur l’eau

La directive cadre sur l’eau fixe des valeurs guides pour la présence de PFAS dans les eaux potables mais peut également être appliquée à d’autres aquifères selon les modalités d’application nationales. Ces valeurs seront opposables dès 2026.Cette directive fixe également une modalité d’analyse, sachant que selon la DCE la limite de quantification (LOQ) doit être a minima égale à 50% de la valeur de qualité proposée.

  • Valeur dite Total PFAS : 500 ng/L pour l’ensemble des PFAS et 100 ng/L pour ∑ 20 PFAS
  • A noter que la valeur dite total PFAS ne sera applicable que lorsque les lignes directrices techniques pour l’analyse de l’ensemble des PFAS auront été élaborées conformément à l’article 13 paragraphe 7 de la DCE.

Pour aller plus loin : Gestion de l’eau en France | Ministère de la Transition Écologique et de la Cohésion des Territoires (ecologie.gouv.fr)

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